08101962

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

VISITES - Page 6

  • ABBAYE de MAZAN Ardèche)

    VISITE  à l'ABBAYE de MAZAN

    Mardi 14 juin 2011. - Décidée lors de notre réunion de Mai, la visite de cette abbaye ardéchoise interessait de nombreux membres. Finalement, nous nous sommes retrouvés seulement quatres à partir, dès 7h30 à l'assaut de la Montagne. Accueilli, à Lacham-Raphaël, par le brouillard nous commencions à désespérer, imaginant notre journée compromise, mais au fil des minutes, le soleil se hasarda à lancer un rayon puis deux, et finalement, il s'installa franchement pour nous accompagner tout au long de nos visites. Le temps d'un café à la ferme-auberge "LaGrolle",ancienne ferme monastique qui domine les restes du monastère et il était temps de rejoindre notre guide : madame Elodie Blanc qui nous attendait devant la mairie.Cette visite, sous la "férule" bienveillante d'Elodie, fut un plaisir : connaissant son histoire de Mazan et des autres sites de la Montagne sur le "bout des doigts", elle sait admirablement doser histoire, anecdotes et humour et son enthousiasme est communicatif. Les deux heures de visite nous ont paru bien courtes. Aussi, un conseil si par une belle journée de juillet ou août vous êtes desoeuvrés, n'hésitez pas et allez faire un tour là-haut, vous profiterez en plus de magnifiques paysages et de l'air vivifiant du Plateau: mais n'oubliez pas votre polaire car les températures sont souvent fraîches à plus de 1000 mètres d'altitude.

     P1000888.JPG

    Avant la Visite. - Avant de partir à travers les ruines, il faut se rafraîchir un peu la mémoire et se replonger dans le Moyen-Age car, hélas, l'histoire de l'abbaye pourrait commencer comme un conte : "il était une fois ..." ou "once upon the time ..." comme aurait dit notre ami Walt Disney, ... mais ici, l'histoire est réelle !

     

    En 1119, deux chanoines de Vivier désireux de trouver un endroit où ils pourraient mener une vie de prière dans le calme et la solitude viennent s'installer sur l'une des crêtes dominant le ruisseau, mais c'est sans compter avec le froid, et la "burle". Les rigueurs de l'hiver eurent raison de leur détermination.

    L'abbaye sera construite un peu plus bas, sur les terres appelées "Masus Adami" ou "Mas d'Adam" données par le seigneur de Géorand. Des moines cisterciens de l'abbaye de Bonnevaux en Dauphiné viennent en1122 ou 1123, édifier les premières constructions, ils donneront aussi le premier abbé. Le monastère, installé sur la rive gauche d'un ruisseau qui porte désormais le nom de Mazan, disposait  de l'eau courante pour les besoins de la vie quotidienne grâce à la construction judicieuse d'un barrage en amont des bâtiments.

    P1000889.JPG

    Situé sur la route des pèlerinages au Puy, l'abbaye s'enricet prend de l'importance, elle essaime trés rapidement et construit :

    - en 1136, l'abbaye du Thoronet dans le Var

    - en 1136, l'abbaye de Sylvanès dans l'Aveyron

    - en 1147, l'abbaye de Bonneval dans l'Aveyron

    - en 1148, l'abbaye de Sénanque dans le Vaucluse

    Au faîte de sa puissance, on pense que l'abbaye compta une centaine de moines ainsi qu'en témoigne la taille du réfectoire aux dimentions imposantes : 52 mètres de long sur 24 mètres de large. Les moines étaient répartis en "moines de choeur" aux occupations spirituelles : prières, lectures sacrées, copies, travaux d'écriture ... et en "moines convers" chargés des taches matérielles ; ceux-là étaient logés prés de l'entrée.

    Pendant la guerre de "Cent Ans", en 1360, l'abbaye fut mise à sac par les routiers ce qui conduisit, en 1375, à la fortification de l'aile sud par la construction d'un mur d'enceinte le long du réfectoire et d'une tour carrée. Sa mise en commende(*) en 1469 signa la fin de ses heures de gloire et de développement.

    Aprés un siècle de calme, elle dut de nouveau subir des exactions : pillée à trois reprises pendant les guerres de religion en 1580, 1584, et 1587, elle vivotera tant bien que mal, les abbés commendataires étant plus soucieux de leur enrichissement personnel que du bien-être des moines et de l'entretien du monastère. Le coup de grâce fut porté en 1789 quand elle fut déclarée "bien national". Les quelques moines qui y vivaient encore se dispersèrentpour ne plus revenir.

    P1000895.JPG

    Mais sa ruine ne fut achevé qu'au milieu du XIX ème siècle quand un curé, qui trouvait l'église abbatiale trop grande, trop froide et trop humide, eut l'autorisation d'en prendre les pierres pour édifier la nouvelle église paroissiale sur l'emplacement de la boulangerie des moines. Le signal était donné : dès lors, les restes, encore conséquents, de l'abbaye furent alors dépecés pour construire les maisons du village et des hameaux voisins. Son classement comme monument historique n'arrêta, malheureusement pas le massacre et il faudra attendre la deuxième moitié du XX éme siècle pour que les habitants prennent conscience de sa beauté et de sa grandeur et la revendiquent. Cependant, cette abbaye reste encore trés mal connue par les ardéchois qui ignorent que l'église abbatiale fut la plus grande et l'une des plus belles du Vivarais.

    Au faite de sa puissance, l'abbaye de Mazan compta jusqu'à dix-huit granges certifiées où allaient travailler les convers dont l'une à Monpezat-sous-Bozon, encore visible : l"Hort" et une autre dans le pay de Berg ( l'assassinat d'un des convers par des paysans du Berg fut à l'aurigine de la fondation de Villeneuve de Berg). En plus du défrichage des forêts, les moines installèrent des mégisseries, ils développèrent le travail du cuir et la fabrication des parchemins ainsi qle travail de la laine.

     

    Visite du site.

    Le réfectoire, le lavabo. On pénètre ce qui fut le réfectoire, sa longueur parait tout de suite imposante, le jardin monastique, encore bien délimité, a été transformé en cimetière communal. Sur la gauche, à l'entrée, subsiste le pavillon du lavabo : il forme l'angle sud-ouest du cloître. C'est une salle carrée couverte d'une voûte en croisées d'ogives reposant sur des culots sculptés dont deux seulement ont échappé au vandalisme ; ils représentent deux figures du tétrmorphe : le taureau symbole de l'évangéliste Luc et l'homme symbole de l'évangéliste Matthieu. La vasque sculptée du lavabo, creusée dans un monolithe d'un mètre de diamètre est, actuellement, utilisé comme bac à fleur dans une résidence secondaire du village.

    Le cloître, le jardin. Du cloître, dont les galeries sud et est furent emportées en 1901 par la crue du ruisseau qui nous paraît aujourd'hui bien inoffensif, il ne subsiste que la galerie occidentale voûtée en berceau brisé. Cette voûte, en pierres volcaniques très sombre, est soulignée par une mince corniche en grès clair. Cette galerie, lode 28 mètres, est éclairée par sept arcades qui reposent sur des piliers carrés alternant avec des colonnettes géminées qui ont toutes disparues. Les pilliers de granit présentent, sur leurs arêtes intérieures, de minces colonnettes engagées aux chapiteaux ornés de motifs trés simples, tous différents. D'autre part, et c'est assez exeptionnel, ces baies présentent une particularité : pour résister au climat rigoureux qui peut régner pendant l'hiver, elles peuvent être closes, de novembre à mars, par des volets de bois aux charnières de fer forgé qui furent arrachées sans ménagement, laissant de profondes meurtrissures, encore bien visibles : la margelle du puit qui en occupait le centre est encore apparente sous le socle de la croix pas du tout médiévale !

    Le cellier (?), les bâtiments des convers. A l'extrême nord-ouest du cloître une porte, semi-enterrée dans les gravats, donne accés à une vaste salle, voûtée en arc brisé, c'était certainement le cellier. Occupée jusqu'à quelques années en arrière par une habitation particulière, elle a été rachetée par la municipalité et est en cours de réhabilitation. A partir du XV ème siècle, il n'y a plus de convers dans le monastère, aussi dans le cellier va être construit un étage pour y aménager un appartement pour l'abbé commendataire, qui était souvent un fils cadet de la famille des châtelains de Suze-la-Rousse. On distingue d'ailleurs les traces d'une cheminée monumentale. Les bâtiments conventuels des convers, dont certains d'entre eux, occupés par la mairie et l'ancien presbytère, existent toujours ; ils s'appuyaient contre le mur d'enceinte qui était percé par l'unique porte d'entrée dont on peut voir le sommet de l'arc qui se trouve maintenant tout prés du sol : un remblai de deux mètres ayant été amené pour construire le pont actuel.

    Les autres bâtiments. Il ne reste plus aucune trace des salles que l'on rencontre habituellement dans une abbaye : salle du chapitre, dortoir, scriptorium, chauffoir,cuisine. Par contre, on sait qu'ils étaient contigus à la galerie est du cloître et que le dortoir était au dessus de ces salles. Tout cet ensemble fut emporté par la crue de 1901 : l'eau du ruisseau en crue, en passant sous les fondations, a sapé la base de toutes ces constructions qui se sont éffondrées.

    L'église. Ce qui reste de l'église abbatiale, (hélas, peu de choses) nous frappe par l'amplitude de ses dimensions. Longue de 52 mètres et large de 24 mètres, la nef, flanquée de deux collatéraux étroits, comportait quatre travées voûtées en berceau brisé. Au cours des années soixante, des fouilles ont permis de retrouver la base des piliers cruciformes, d'une dimentsion impressionnante, qui supportaient la voûte. Une coupole, de 20 mètres de haut, coiffait la croisée du transept et la toiture étaient constitués de lauzes. La façade occidentale,conservée jusqu'à mi hauteur, était percée de deux baies et d'un oculus de grande dimension, elle ne comportait pas de portail : les moines entraient dans l'église par deux petites portes s'ouvrant sur les collatéraux. Le choeur, formant abside était éclairé par trois baies à ébrasement. C'est certainement la partie la plus anciede l'édifice, la plus récente étant la façade qui daterait du XIV ème siècle. La rigueur des hivers de la Montagne (le travail n'est possible que de fin mai à octobre) justifie la durée de construction, elle expluique aussi la grande hétérogénéité du monument. L'abside, avec ses trois grandes fenêtres est encore bien reconnaissable ainsi que l'absidiole sud, par contre, l'absidiole nord n'est plus qu'un tas de gravas. Une partie des murs nord et sud sont encore bien conservés et, adossés au mur sud, on peut encore discerner les restes de deux enfeus funéraires et l'on sait que d'autres enfeus existaient aussi adossés au mur nord. La base des murs de la sacristie, accolés à l'absidiole sud, sont encore bien repérables. Les murs trés épais, étaient constutués par des dalles de pierres de granit ou de pierre volcanique espacées. Entre les deux parements, il y avait un remplissage de pierrs, terre et chaux. Le sol de l'église et des bâtiments était en terre battue sauf,peut être, dans le cellier où des traces de dallage ont été découvertes.

    Visibles de l'abbaye, l'actuelle ferme-auberge "La Grolle" est certainement la plus ancienne  ferme du monastère. C'était la ferme de la "Grande Porte", elle date des XVIème ou XVII ème siècle. Inocupée depuis longtemps, elle était pratiquement tombée en ruine, jusqu'à ce que la mairie la rachète, la réhabilite et la mette en gérance.

    Travaux de restauration prévus. Des travaux sont prévus dans un cellier pour lui redonner son aspect d'antan. Ils s'échelonneront sur deux tranches de 480000 puis 510000 €. On ne peut qu'admirer la volonté et le courage d'un village de 135 habitants.

    L'église paroissiale. Construite au XIX ème siècle, en style néo-gothique, elle n'a rien de remarquable sauf l'ensemble de ses vitraux créés par le peintre-verrier Louis René Petit en 1998, à l'occasion du 900 ème anniversaire de la création de l'ordre de Citaeaux. Ces vitraux en p^te de verre teintée dans la masse puis traités à la cire et à l'acide sont trés lumineux.

    (*) commende : Concession d'un bénéfice accordé à un éclésiastique ou à un laïque qui en touchait les revenus mais ne résidait pas sur place : particulièrement répendu à partir du XVI ème siècle.

    abbé commendataire : abbé qui bénéficie d'une commende.

                                                                                                                         A.F